Contexte

 

TOUTON, un acteur agro-industriel avec une histoire de plus de 150 ans, est profondément engagé dans la promotion de la durabilité le long de ses chaînes d'approvisionnement au Ghana. La société a pris des mesures concrètes en instaurant un modèle novateur de Paiement pour les Services Écosystémiques (PSE) au sein de ses paysages ghanéens. L'objectif fondamental de cette initiative est d'inciter les petits producteurs à adopter des pratiques agroforestières, favorisant ainsi la durabilité environnementale et économique dans la région.

Afin de maximiser l'impact de cette démarche, TOUTON reconnaît la nécessité d'optimiser la conception, la mise en œuvre, et les modalités de paiement du modèle PSE. Pour atteindre ces objectifs ambitieux, TOUTON a sollicité l'expertise d'un Consultant, doté d'une expérience significative en Afrique de l'Ouest et centrale, pour guider et soutenir la phase pilote du modèle au Ghana.

La mission de consultance s’est inscrite dans un cadre plus large visant à renforcer les capacités des petits exploitants en PSE. 

 

 Objectifs 

 

La consultance visait à optimiser et à renforcer la mise en œuvre du modèle de Paiement pour les Services Écosystémiques (PSE) dans les paysages d'approvisionnement en cacao de TOUTON au Ghana, par l’élaboration d’un modèle PSE robuste, transparent et durable, favorisant la durabilité environnementale, le bien-être des petits producteurs et attirant des investissements pour soutenir la production durable de matières premières.

De façon plus précise, il s’agissait de :

  1. Réviser et mettre à jour le modèle existant de PSE agroforestier de TOUTON ;
  2. Partager les expériences sur le processus CLIP et les modalités de paiement appliquées dans des contextes similaires ;
  3. Faciliter un atelier consultatif avec les agriculteurs pour les sensibiliser au modèle PSE et au processus CLIP.
  4. Sensibiliser à l'identification et à la sélection des bénéficiaires ;
  5. Identifier des sauvegardes sociales pertinentes et développer un mécanisme/outil pour les suivre ;
  6. Présenter un rapport de consultation final comprenant des recommandations pour renforcer le modèle PSE

 

Résultats obtenus 

 

La méthodologie adoptée pour remplir les objectifs de cette consultance, comprenait une revue bibliographique, une phase de collecte de données terrain et une phase rédactionnelle. La revue bibliographique a servi à l’analyse documentaire approfondie du modèle PSE existant. Quant à la phase de collecte de données, elle a permis à compléter les informations pour réaliser l’analyse SWOT en vue des ajustements basés sur les meilleures pratiques, le partage d'expériences sur le processus CLIP, des ateliers consultatifs avec les producteurs, et la sensibilisation à l'identification des bénéficiaires. Enfin, la dernière phase devait permettre de compiler les informations et présenter les résultats attendus sous les formats indiqués pour les livrables de la mission.

Évaluation du modèle PSE initial

L’analyse SWOT résultant de la revue bibliographique et de l’exploitation des données du terrain, a permis d’identifier les points forts et limites du modèle PSE initial de TOUTON.  Ainsi, l’analyse a révélé les forces suivantes : 

  • TOUTON comprend de manière holistique le lien entre la culture du cacao et la déforestation, adoptant une approche spécifique au secteur cacaoyer.
  • La sensibilisation des agriculteurs sur les avantages des arbres et l'enregistrement des arbres crée une base pour des pratiques durables.
  • La volonté de diversifier les espèces montre une compréhension de l'importance de la biodiversité.
  • La formation des producteurs en agroforesterie facilite la mise en œuvre du projet.
  • Le modèle offre des incitations spécifiques, créant une motivation directe à adopter des pratiques durables.

Des faiblesses ont également été décelées ; il s’est agi de :

  • La dépendance à des espèces à croissance rapide pourrait limiter la diversité et la résilience écologique des systèmes agroforestiers et doit être adressé pour assurer la durabilité à long terme.
  • Les coûts d'opportunité peuvent décourager les producteurs déjà en vulnérabilité financière.
  • La mise en œuvre complexe du modèle, de la sensibilisation à la documentation des droits fonciers peut être un obstacle à son adhésion et à son appropriation.
  • Les barrières linguistiques liées à la non prise en compte de certaines catégories sociales dans la diffusion des messages pourrait en réduire la portée et l’impact.
  • La détermination tardive des besoins en plants, ne favorise pas une production optimale de certaines espèces et ne facilite pas la mise à disposition des plants tout en respectant le calendrier pluvial.

Quant aux opportunités, elles se déclinent en deux points qui sont la collaboration avec des partenaires locaux et les marchés durables par les partenariats avec des entreprises promouvant des pratiques durables. Elles offrent une occasion de renforcer l'efficacité du modèle par la mobilisation de ressources financières.

Enfin les menaces de ce modèle qui se déclinent principalement dans la résistance au changement de certains agriculteurs devant les coûts initiaux élevés de mise en œuvre du modèle, les pressions économiques qui peuvent compromettre leur adhésion à des pratiques agroforestières à long terme et les problèmes fonciers qui pourraient émerger lors de l'enregistrement des arbres et de la documentation des droits fonciers.

Cette analyse SWOT a permis au Consultant de proposer les mesures correctives et préventives pour la révision du modèle PSE de TOUTON. Il s’est agi principalement de : 

  1. Renforcer les liens entre les pratiques agroforestières et la lutte contre la déforestation à travers des campagnes de sensibilisation ciblées.
  2. Sensibiliser les agriculteurs à diversifier les espèces d’arbres en agroforesterie par des supports multilingues et une formation renforcée.
  3. Systématiser les formations sur les bonnes pratiques agricoles et environnementales pour tous les bénéficiaires du projet et en élargir les thématiques.
  4. Créer des incitations financières ciblées en maintenant des incitations compétitives et en explorant des paiements différenciés.
  5. Développer des partenariats  en élargissant les partenariats et en créant une plateforme de concertation territoriale.
  6. Créer des marchés durables en explorant la possibilité de certification des produits agroforestiers (labels).
  7. Renforcer la diversité des espèces par des incitations pour espèces à croissance lente, le renforcement de l’éducation sur avantages écologiques et économiques à long terme de la diversité des espèces.
  8. Optimiser les incitations financières en réévaluant et en communiquant davantage sur les bénéfices des produits forestiers non ligneux (PFNL).
  9. Simplifier le processus et lever les barrières linguistiques par des outils de communication clairs et des formations régulières.
  10. Planification précoce des besoins en espèces : Déterminer les besoins en plants un an à l'avance.
  11. Gérer la résistance au changement par des programmes de sensibilisation ciblés, et l’implication des leaders communautaires.
  12. Gérer les problèmes fonciers par la collaboration avec les autorités locales et un mécanisme transparent d'enregistrement des arbres
     

Révision du modèle PSE 

Cette révision du modèle s’est faite dans une approche participative sur la base d’intégration des meilleures pratiques. En effet, les avis et observations des parties prenantes ont été au cœur de la révision du modèle PSE de TOUTON. Cette approche a permis la proposition d’ajustements pour optimiser l'efficacité opérationnelle du modèle, alignant les pratiques sur les normes internationales de durabilité.

Partage d'expériences sur le processus CLIP

Tout d’abord, le Consentement Libre, Informé et Préalable (CLIP) a été expliqué, soulignant son importance dans le contexte des PSE. Ensuite, Des sessions interactives sur le CLIP ont été menées avec l'équipe TOUTON, adaptant les principes du CLIP au contexte local.

Atelier consultatif avec les producteurs 

Lors de cet atelier, des stratégies ont été développées pour informer les producteurs sur le modèle révisé, encourageant leur participation active. Aussi, des échanges constructifs entre TOUTON et les producteurs ont-ils été facilités, collectant des rétroactions pour améliorer le modèle.

Sensibilisation à l'identification et à la sélection des bénéficiaires 

Au cours de ces sessions, des formations ont été dispensées aux producteurs sur les critères de sélection, renforçant leurs compétences par des exercices pratiques. Une compréhension collective des enjeux a été promue, renforçant le sentiment d'appartenance à la communauté agricole.

Identification des sauvegardes sociales et mise en place d’un outil de Suivi 

Une identification proactive des risques a été effectuée avec des stratégies préventives et d'atténuation. Un outil de suivi a également été développé pour suivre ces sauvegardes sociales avec des indicateurs clés pour évaluer l'efficacité des mesures.

Recommandations et perspectives

Des ajustements spécifiques au modèle PSE ont été proposée pour prendre en compte l'engagement de TOUTON envers la durabilité et la responsabilité sociale. 

Il a été notamment suggéré une analyse économique et financière pour déterminer le montant minimum incitatif du modèle PSE de TOUTON au Ghana prenant en compte les réalités socioéconomiques des bénéficiaires, tout en encourageant la durabilité à long terme des pratiques agroforestières. Ce prix est fonction des indicateurs suivants : 

  1. Revenu des agriculteurs : Évaluer le revenu actuel des agriculteurs participants dans le modèle PSE. Le prix minimum doit être suffisamment attractif pour compenser toute perte potentielle de revenu résultant de la transition vers des pratiques agroforestières durables.
  2. Coûts d'opportunité : Comprendre les coûts d'opportunité que les agriculteurs pourraient supporter en adoptant des pratiques à plus long terme. Le prix minimum devrait compenser ces coûts et rendre les pratiques agroforestières plus attrayantes.
  3. Niveau de vie local : Prendre en compte le niveau de vie local pour garantir que le prix minimum offre des incitations significatives et améliore les conditions de vie des agriculteurs participants.
  4. Prix du marché : Examiner les prix du marché actuels pour les produits agricoles issus des pratiques agroforestières. Le prix minimum doit être compétitif par rapport aux alternatives moins durables.
  5. Investissements dans le développement local : Considérer les besoins en investissements pour le développement local. Le prix minimum pourrait être lié à des initiatives de développement communautaire, garantissant ainsi un impact positif sur les communautés.
  6. Coûts de transition : Évaluer les coûts associés à la transition vers des pratiques agroforestières, tels que les coûts de formation et de mise en œuvre. Le prix minimum doit couvrir ces coûts pour encourager l'adhésion.
  7. Rentabilité à long terme : Évaluer la rentabilité à long terme des pratiques agroforestières en termes d'amélioration de la productivité, de résilience environnementale et de durabilité. Le prix minimum devrait refléter ces avantages à long terme.
  8. Indicateurs environnementaux : Intégrer des indicateurs environnementaux, tels que la séquestration du carbone et la conservation de la biodiversité, dans la détermination du prix minimum pour refléter les bénéfices écologiques des pratiques agroforestières